L’Europe au défi du conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan
L’Europe au défi du conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan

Paris, le 20 septembre 2023
Par Jean-Luc Perron et Sven Franck
Le 21 septembre, le peuple arménien célèbre l'indépendance de la République d'Arménie, acquise en 1991 dans les derniers jours de l’URSS. Cependant, l'ambiance est loin d'être à la fête : en violation de l’accord de cessez-le-feu conclu le 10 novembre 2020 sous l’égide de la Russie, l'Azerbaïdjan vient de lancer une campagne de tirs intensifs contre les populations et le territoire du Haut-Karabakh. Cette agression militaire intervient alors que depuis bientôt 300 jours, les 120 000 Arméniens du Haut-Karabakh restent coupés des approvisionnements essentiels en nourriture, médicaments et énergie, en raison du blocage par les forces azerbaïdjanaises du corridor de Latchin, seule voie de communication terrestre entre l’Arménie et le Haut-Karabakh.
L’Azerbaïdjan maintient ce blocus en dépit de l’injonction de la Cour Internationale de Justice du 23 février 2023. Un camion d’aide du Comité international de la Croix-Rouge a certes été autorisé à pénétrer dans le Haut-Karabakh il y a quelques jours, mais des dizaines d’autres en sont empêchés Latchin. Le but non dissimulé de l’Azerbaïdjan est d’affamer les habitants de la République autoproclamée d'Artsakh, nom arménien du territoire enclavé dans l'Azerbaïdjan, voire de provoquer un nettoyage ethnique en poussant ses habitants à quitter leurs terres ancestrales. Luis Moreno Ocampo, ancien procureur général de la Cour pénale internationale, n’hésite pas à parler d’une tentative de génocide. Bien que l’Arménie et l’Azerbaïdjan aient tenu des pourparlers de paix depuis des décennies dans le cadre du Groupe de Minsk créé par l’OSCE, aucune solution réelle n'a vu le jour pour le Haut-Karabakh. VOLT demande un arrêt immédiat de toutes les actions militaires, le respect du cessez-le-feu et l’ouverture de nouvelles négociations sous l’égide de l’ONU pour résoudre le conflit.
Quel rôle pour la communauté politique européenne ?
Le 30 mai dernier, VOLT a alerté la Communauté politique européenne, lors de sa réunion de Chisinau, sur les menaces existentielles que l’Azerbaïdjan fait peser sur les populations d’Arménie et du Haut-Karabakh, en adressant une lettre ouverte aux principaux dirigeants européens. Cependant, malgré la mobilisation de Charles Michel, Président du Conseil européen, la situation sur le terrain ne fait qu’empirer. Dans ce contexte, la Communauté politique européenne reste une communauté sans contraintes : ses membres – y compris l'Arménie et l'Azerbaïdjan – sont censés dialoguer, mais la Communauté Politique Européenne ne dispose pas de moyens de pression pour obtenir des résultats concrets.
L'Union européenne elle-même fait profil bas : après avoir signé un mémorandum d'accord en juillet 2022 avec l'Azerbaïdjan pour accroître de manière significative le transfert de gaz via le gazoduc du corridor sud, l'Union européenne se limite à des incantations verbales, appelant à la paix aux côtés de la France et de l'Allemagne. Nous sommes encore loin de voir une action de politique étrangère de l'Union européenne digne de ce nom. L'Europe semble se satisfaire de sa seule dimension économique et s’inquiéter de son approvisionnement en gaz, sans prendre en considération l’importance stratégique de la région, ni les enjeux liés à la paix, à la démocratie et aux droits de l’homme. Nous ne pouvons pas nous replier derrière nos seuls intérêts économiques, ni derrière la rivalité entre la Russie et les États-Unis dans cette région.
Le Communauté politique européenne peut servir d’interface de dialogue entre États membres et pays voisins, mais c'est à l'Union européenne d'être à la hauteur de ses responsabilités et de ses ambitions.
Pour une politique étrangère européenne engagée et imaginative
L'Union européenne est déjà engagée dans des missions militaires et civiles à travers le monde dans le cadre de la Politique de sécurité et de défense commune (PSDC). Elle a pris l’initiative de créer la mission EUM ARMENIA, chargée d'observer les frontières arméniennes et du Haut-Karabakh. Mais compte tenu de la situation nouvelle créée par l’agression azerbaïdjanaise, l’Union européenne doit aller plus loin en sécurisant non seulement le corridor de Latchin, mais également en favorisant et garantissant un cessez-le-feu effectif.
Face à l’inaction de la Russie pour garantir la sécurité de la population du Haut-Karabakh, l'Union européenne devrait prendre des initiatives pour assurer l'approvisionnement de la population du Haut-Karabakh, et veiller à l’effectivité d’un nouveau cessez-le-feu. La mise en place d’un pont aérien humanitaire permettrait à la population du Haut-Karabakh de survivre à l'hiver. L’histoire ne manque pas de précédents : ainsi en 1948-1949, c’est par un pont aérien organisé par les Alliés que la population de Berlin-Ouest, soit 2,2 Millions de personnes a été approvisionnée.
L'Europe doit aussi contribuer à une solution stable à long terme pour le Haut-Karabagh. Des solutions innovantes élaborées et discutées pour résoudre ce conflit pourraient faire jurisprudence et inspirer d’autres zones de tensions. Un mandat pourrait être confié par l’ONU à une coalition de pays européens, prêts à s’engager pour garantir pendant vingt ans la sécurité et le développement de la population du Haut-Karabakh, à l’abri d’une force de police internationale. Une telle solution ne remettrait pas en cause le principe d’appartenance du Haut-Karabakh à l’Azerbaïdjan. Un dispositif de « double souveraineté » pourrait être imaginé en reconnaissant deux entités co-souveraines sur le même territoire, l’Azerbaïdjan ne pouvant exercer sa souveraineté que dans les limites fixées pour garantir la libre administration du Haut-Karabakh par ses représentants élus. Il existe déjà des exemples d’une co-souveraineté sur un territoire donné. Ainsi l’Association Schleswig du Sud est une minorité danoise vivant dans le nord de l'Allemagne. Celle-ci n’est pas soumise au seuil obligatoire de 5 % lors des élections, et est ainsi représentée dans les parlements municipaux, régionaux et nationaux. Dans les démocraties, une représentation politique offre une voie alternative pour créer les conditions nécessaires à la stabilité et à la coopération.
Il existe plusieurs manières pour l'Union européenne d’avoir un impact sur le conflit. Pour véritablement asseoir son influence géopolitique, elle doit élaborer sa propre doctrine de politique étrangère et la mettre à l’essai pour apaiser des conflits aux portes du continent. L’Union européenne doit s’engager résolument comme faiseur de paix dans le conflit opposant l'Arménie et l'Azerbaïdjan, afin de prévenir une catastrophe humanitaire et trouver une solution pacifique et stable pour l'avenir.
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En tant que premier véritable parti paneuropéen, Volt s'engage à réformer l'Union européenne et à répondre aux défis de nos jours de manière coordonnée au niveau européen. La vision de Volt : une Europe progressiste avec une société inclusive, une économie qui protège le climat, un système éducatif adaptable et une numérisation autodéterminée.
Volt est convaincu que seule une participation démocratique de tous les citoyens et toutes les citoyennes européens nous préparera à un avenir durable, économiquement fort et socialement juste. Voilà pourquoi Volt agit à tous les niveaux - du local à l'européen, en tant que mouvement et parti. Le mouvement donne à toutes et à tous une voix et la possibilité de s'engager politiquement à partir de la société. Aujourd'hui, Volt est présent dans toute l'Europe : des milliers de personnes de tous âges et de toutes professions s'engagent dans 30 pays européens avec des équipes dans des centaines de villes.
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Mis à jour le 19 septembre 2023